CFTC Paris | Casseurs? ou bourgeois encanaillés
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Casseurs? ou bourgeois encanaillés

Casseurs? ou bourgeois encanaillés

Chronique de J. THOUVENEL du 31.05.2016 sur Radio Notre Dame (100.7)
Lire la chronique, c'est bien ! L'écouter, c'est encore mieux !

loi-travail.des-casseurs-organises-des-services-dordre-depasses.jpgBonjour à toutes et tous,

Cher Jean-Jacques, tu as été choisi par une radio de service public pour être la voix des casseurs, ces jeunes gens dynamiques et masqués qui brisent, détériorent, saccagent vitrines et commerces le long des manifestations.

En bon acteur révolutionnaire tu t’exprimes à l’abri d’un pseudonyme, précaution élémentaire pour qui fréquente les dangereux maquis des rues commerçantes de nos cités. Tu as évité Michel, pseudo d’un ancien trotskyste devenu Premier Ministre.

Sans doute marqué par ces racines chrétiennes qui n’existent pas, tu couvres ta clandestinité en optant pour les prénoms de deux frères, deux apôtres.

Le premier, évangéliste, nous a conté l’apocalypse, texte souvent inquiétant « le soleil devient noir comme un cercueil de crin, la lune ressemble à du sang, les étoiles du ciel tombent sur la terre qui elle ne cesse de trembler, le puits de l’abîme lui-même s’ouvre et la bête domine le monde ». Je comprends que ce récit ait pu te marquer, susciter en toi une juste révolte contre les puissants de ce monde, serviteurs de la bête.

Toutefois, tu aurais dû aller jusqu’à la fin de ce dévoilement. Etymologiquement, apocalypse signifiant dévoilement, révélation. Tu aurais appris et compris que ce n’est pas par la violence que le mal est vaincu mais par l’entremise d’une femme, d’une mère, reine de l’amour.

Le second frère, Jacques était surnommé par Saint Marc, fils du tonnerre ou fils de la tourmente. On peut comprendre qu’un tel parrainage n’ouvre pas naturellement la voix à une pratique
politique faite de douceur et de non-violence.

Mais enfin Jean-Jacques, tu es un grand garçon de 33 ans ! Professeur de lettres de ton état. Tu dois savoir qu’il y a un temps pour tout. Un temps pour la crise d’adolescence, un temps pour la responsabilité. Quand on a choisi d’être employé rémunéré par l’Etat, on se dispense de proclamer sur les ondes « je suis contre l’Etat ». Il n’est jamais sain de mordre la main qui te nourrit.

Quand on veut défendre le peuple on s’abstient de casser le mobilier urbain et les devantures de banque, ne serait-ce que pour éviter au petit peuple qui nettoie d’avoir un surcroit de travail sans surcroit de rémunération. Je t’en parle en connaissance de cause, mon cher Jean-Jacques, je fus dans ma jeunesse homme de ménage.

En outre, je ne suis pas sûr que le bris de quelques dizaines de vitrines est vraiment tourmenté les patrons du CAC 40.

Quand on est professeur de lettres, on doit avoir réfléchi à l’affirmation de Diderot « l’excès de liberté ne peut tourner qu’en un excès de servitude pour un particulier aussi bien que pour un Etat ». Si Diderot sonne trop franchouillard à tes oreilles, écoute Shakespeare «  la liberté sans frein est toujours mariée avec le malheur ».

Si tu n’es pas convaincu, je crains mon cher Jean-Jacques, que tout professeur de lettres que tu sois, le qualificatif qui te sied s’écrit de façon simple et sonore en trois lettres.

A la semaine prochaine !