CFTC Paris | Chronique de Joseph Thouvenel: la rengaine de la simplification du Code du Travail.
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Chronique de Joseph Thouvenel: la rengaine de la simplification du Code du Travail.

Chronique de Joseph Thouvenel: la rengaine de la simplification du Code du Travail.

Chronique de Joseph THOUVENEL du 16 mai 2017 sur Radio Notre Dame (100.7)

Louis Daufresne : Avec la nouvelle présidence, il est beaucoup question de modification du code du Travail. Qu’en est-il exactement ?

Joseph Thouvenel : Cette partition n’est pas nouvelle. A force, elle tourne à la rengaine. Vous remarquerez que depuis des décennies, ceux qui parlent de simplifier le code du Travail s’ingénient à le complexifier une fois aux manettes.

La loi Macron en faveur des grandes surfaces le dimanche ne m’apparaît pas comme un exemple de simplicité par exemple.

Louis Daufresne : Tout est bien, rien ne doit évoluer Joseph ?

Joseph Thouvenel : Non Louis, rien n’a à être figé par principe, mais il faut savoir prioriser et ne pas combattre les moulins à vent en lieu et place des vrais problèmes.

Une des priorités sociales devrait être la lutte contre le travail non déclaré, à commencer par sa forme la plus abjecte : la traite des êtres humains.

Est-il tolérable de voir des femmes de toutes origines jetées sur les trottoirs de Paris pour être traitées comme des objets de consommation par des mâles aux pulsions bestiales ?

Et toutes ces personnes sous la coupe de réseaux mafieux, comme ces gamins mendiants, voleurs ou ces asiatiques taillables et corvéables à merci, marnant dans des ateliers clandestins ?

Il y a là une urgence sociale et morale.

Louis Daufresne : Vous mettez en lumière un aspect particulièrement choquant du travail illégal, mais celui-ci à bien d’autres facettes.

Joseph Thouvenel : Vous avez raison, la traite des êtres humains n’est qu’une forme du travail illégal.

Les gros bataillons concernent le non-paiement des contributions sociales, via par exemple des salariés non ou que partiellement déclarés. Ces cas sont relativement fréquents dans le bâtiment, l’hôtellerie restauration, le spectacle ou encore l’agriculture.

Les salariés concernés, parfois complices, courent un certain nombre de risques importants, comme de ne pas être pris en charge en cas de maladie ou d’accident.

Arrivé à l’âge de la retraite en ayant peu cotisé, ces personnes verront la trappe à pauvreté s’ouvrir sous leurs pas et feront appel à la solidarité nationale, générant des coûts pour l’ensemble de la collectivité.

Quand à l’entreprise respectueuse des règles, elle subit de plein fouet la concurrence déloyale des tricheurs et voit petit à petit ses clients se détourner du profit du concurrent moins disant.

Autre sujet, les faux indépendants. Ces travailleurs au statut officiel d’indépendant, qui en fait, sont assujettis à un donneur d’ordre ou au propriétaire d’un logiciel.

Quand Uber impose ses prix à ses chauffeurs, peut-on parler d’indépendance ?

C’est plutôt, à vous le risque, à moi les gros bénéfices.

Il y a urgence à travailler sur la notion de subordination économique, qui devrait entrainer des obligations pour le donneur d’ordre, notamment de participation à la couverture sociale de ses subordonnés. Cela serait socialement juste et économiquement approprié pour éviter la concurrence déloyale.

Il me paraît également indispensable de renforcer la coordination européenne entre les inspections du travail, tout en comblant les trous dans la réglementation.

Savez-vous, que notre inspection du travail n’a pas la possibilité de contrôler l’équipage d’un navire faisant escale dans nos ports ?

Entre la compagnie qui respecte notre code maritime et l’armateur qui fait naviguer un équipage mal formé, peu voire pas payé, sur un navire poubelle, la compétition est-elle équilibrée ?

La lutte contre le travail illégal, ce sont des milliers d’emplois à la clé et des dizaines de millions d’euros pour notre protection sociale.

C’est également rendre leur dignité à des milliers de personnes. Il serait souhaitable d’en faire une priorité.