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Chronique de Joseph Thouvenel- PIB, une économie de brute ?

Chronique de Joseph Thouvenel- PIB, une économie de brute ?

Chronique de Joseph THOUVENEL du 30 mai 2017 sur Radio Notre Dame (100.7)

Louis Daufresne : Aujourd’hui, vous attirez notre attention sur ce qui vous semble être une erreur majeure dans la résolution de la crise actuelle.

Joseph Thouvenel : Si indéniablement nous vivons une crise économique et sociale, je crois que certaines solutions présentées comme incontournables portent en germe plus de menaces que de remèdes.

Première erreur à mes yeux, cette obsession de voir augmenter le Produit Intérieur Brut, le fameux PIB.

Louis Daufresne : Vous êtes opposé à la création de richesse?

Joseph Thouvenel : A la création de vraies richesses, y compris matérielles, certainement pas. Mais je critique la prééminence voire la tyrannie du PIB sur nombre « d’experts ».

Il ne s’agit que d’un indicateur, et parfois un mauvais indicateur.

Louis Daufresne : Objectivement Joseph, un indicateur c’est juste un indicateur, rien de plus.

Joseph Thouvenel : Pas tout à fait Louis. Si nous décidons de rémunérer deux personnes pour creuser un trou et d’y enfouir des barils de produits chimiques, nous aurons participé à l’augmentation du PIB.

Si quelques mois plus tard, ces produits toxiques s’écoulent jusqu’à une rivière détruisant faune et flore, mobilisant pompiers et brigades spécialisées pour arrêter l’écoulement, dépolluer les eaux, extraire de leur trou ce qui reste des barils et reboucher la cavité.

Pour le Produit Intérieur Brut, c’est tout bénéfice, statistiquement ce drame écologique aura créé de la richesse.

Ce qui amène à se poser cette simple question, de quelle richesse parlons-nous ?

Peut-on souhaiter voir des dizaines d’Erika faire naufrage sur nos côtes pour augmenter notre PIB ?

Je ne le crois pas.

Il nous faut retrouver le chemin d’un développement durable et raisonnable. Ce développement est d’une autre nature que l’entassement hétéroclite d’activités plus ou moins utiles voire carrément nocives.

Quand, en 2014 la Grande Bretagne passe devant la France dans le classement des puissances économiques mondiales, c’est simplement dû à une manipulation de nos amis britanniques qui ont fait rentrer dans le calcul du PIB anglais, l’argent ; estimé ; de la drogue, la prostitution et autres trafics.

Quand à la Chine, n°2 derrière les USA, je ferai deux remarques.

La première : Je ne crois pas à la fiabilité des chiffres issus d’une dictature où tout est verrouillé par le parti.

La seconde : Mettre sur le même plan statistique la production issue d’une coutellerie de Laguiole dans l’Aveyron et celle de faux couteaux Laguiole provenant d’un camp de travail au fin fond du Sichuan, m’interpelle quelque peu.

En bref, j’estime que le PIB est un indicateur intéressant, mais en partie vicié à l’utilité très fortement surestimée.

Sans aucun doute faut-il, comme le préconise le Pape François dans l’encyclique Laudato Si, repenser les interactions entre l’être humain, la société et l’environnement.

Nous devons sortir de la dictature scientiste qui ne prend en compte que ce qu’elle peut mesurer, le reste est au mieux considéré comme insignifiant, voire inexistant.

Ce mauvais principe conduit à estimer que le temps passé en famille ou à l’éducation des enfants, n’a aucune valeur.

Effectivement pour le PIB, c’est égal à zéro.

Mais des sauvageons déchainés qui cassent des vitrines et brûlent des voitures, ça c’est bon pour le produit intérieur brut, et si en plus on construit des prisons c’est encore meilleur.

Tout simplement consternant !