
09 Juin Droit disciplinaire et délai de prescription
En application de l’article L1332-4 du code du travail, aucun fait fautif ne peut donner lieu à lui seul à l’engagement de poursuites disciplinaires au-delà d’un délai de deux mois à compter du jour où l’employeur en a eu connaissance, à moins que ce fait ait donné lieu dans le même délai à l’exercice de poursuite pénales.
Par engagement de poursuites disciplinaires on entend normalement la convocation à l’entretien préalable lorsque celui-ci est obligatoire (cas où la sanction envisagée est autre qu’un avertissement ou une sanction de même nature n’ayant pas d’incidence, immédiate ou non, sur la présence dans l’entreprise, la fonction, la carrière ou la rémunération du salarié).
Lorsque la sanction est une modification de contrat pour motif disciplinaire le salarié est en droit de refuser cette sanction. Si le salarié refuse la modification, cela interrompt le délai de prescription des faits fautifs.
L’employeur dispose alors d’un nouveau délai de deux mois pour prendre une nouvelle sanction le cas échéant.
S’il prend cette sanction de substitution, et que celle-ci requiert un entretien préalable, le salarié doit être convoqué dans les deux mois qui suivent son refus.
Mais à quelle date intervient le refus du salarié dans le cas où l’employeur laisse un délai de réflexion, que le salarié laisse passer ce délai et ne refuse la modification de son contrat expressément que postérieurement ?
C’est la question qui a été posée à la Cour de Cassation le 27 mai dernier (N°19-17587) à propos d’un salarié qui s’était vu notifier une mutation disciplinaire le 2 mai 2013.
Son employeur lui avait donné un délai de réflexion jusqu’au 10 mai, en lui précisant que le défaut de réponse à cette échéance vaudrait refus de la mutation.
Le salarié a exprimé expressément sa désapprobation le 18 mai 2013.
L’employeur l’a alors convoqué à un nouvel entretien préalable le 16 juillet 2013 et notifié le 29 juillet une rétrogradation disciplinaire, que le salarié a accepté expressément saisissant toutefois la juridiction prud’homale en annulation de celle-ci, motif pris du point de départ du nouveau délai de prescription.
En effet, naturellement selon l’employeur le délai à prendre en compte était celui courant à compter du refus express du salarié (soit le 18 mai) et pour le salarié dès l’expiration du délai de réponse (soit le 10 mai.
La Cour de Cassation valide le raisonnement de la Cour d’appel qui elle-même donnait raison au salarié et fixe le point de départ du délai de deux mois à la date du refus implicite.
« L’employeur avait fixé au 10 mai 2013 le délai à l’expiration duquel l’absence de réponse du salarié vaudrait refus de la sanction disciplinaire proposée ». « Le délai de prescription de deux mois courait à partir de cette date, peu important le refus de l’intéressé réitéré de façon expresse postérieurement ».
Ainsi, l’initiation d’une seconde procédure disciplinaire le 16 juillet 2013 était tardive car intervenue plus de deux mois après le délai de réponse.
La rétrogradation prononcée devait donc être annulée.