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Entreprise et syndicats La grande mutation

Entreprise et syndicats La grande mutation

Article paru dans le mensuel l’Ivisible, diffusé à 200 000 exemplaires par mois. N°26 mai 2012

Bien commun. Arrivé en bout de course, le système de représentativité des syndicats est en pleine transformation. Et les avis sont partagés.

 

La France est le pays de l’OCDE où le taux de syndiqués est le plus faible (autour de 8 % au total des salariés, dont 5 % dans le secteur privé), malgré le nombre très important d’organisations syndicales. Cela vient notamment du manque de représen­tativité des syndicats dans les entreprises. Jusqu’en 2008 seules cinq confédérations syn­dicales avaient la légitimité de représenter les salariés : CGT, CFDT, CGT-FO, CGC et CFTC. Un privilège accordé par le général de Gaulle après la guerre pour récompenser les centrales syn­dicales de leur action dans la Résistance. Mais cet avantage a fini par se retourner contre ses bénéficiaires. Pour Marcel Gri­gnard, secrétaire adjoint de la CFDT : « Le système était à bout de souffle : des organisations syndicales dont la représentati­vité était octroyée par décret du gouvernement, un syndicalisme éclaté, avec peu de syndiqués. Tout cela conduisait à l’affai­blissement du syndicalisme, à la remise en cause de sa capacité à négocier au nom des salariés, et à délégitimer les accords issus de la négociation collective. »

Aujourd’hui, le syndicalisme français est donc en pleine mutation, grâce à la loi d’août 2008 qui introduit un nouveau critère : l’audience. La représentativité des syn­dicats est désormais mesurée en fonction des résultats aux élections professionnelles. Ainsi, une organisation syn­dicale doit obtenir 10 % des suffrages au premier tour des élections pour être repré­sentative. Seules les organi­sations syndicales représen­tant au mieux les personnels au sein des entreprises pour­ront jouer un rôle dans la négociation collective. Pour Jean Grosset, secrétaire général adjoint de l’UNSA, un tel changement mettra plus de pression sur chaque syndicat, qui « devra prouver son utilité par les améliora­tions concrètes qu’il apporte aux salariés dans l’entre­prise ou par ses prises de position compréhensibles lorsqu’il s’oppose à des mesures patronales, gouver­nementales… » Mais, selon Marcel Grignard, il leur don­nera aussi plus de poids : « Ce sont les salariés qui seront à la source de la représentativité, ce qui don­nera une légitimité nouvelle aux partenaires sociaux. » Cependant, ce changement n’est pas sans risque. Pour Joseph Thouvenel, vice-pré­sident de la CFTC, « ce sys­tème pousse les délégués syndicaux à ne plus être les représentants de leurs man­dants, dans le souci du bien commun, mais des agents électoraux dont la vocation est de faire du chiffre. » Pour le représentant du syndicat chrétien, le système pourrait être encore amélioré : « Pour être représentatif au niveau national, un des critères devrait être un minimum d’adhérents. Mais cela obli­gerait les uns et les autres à être transparents sur la réa­lité de leurs effectifs… »

Gérard Biverny 

3 questions à Joseph Thouvenel : « Des syndicats respectueux »

 

Vice-président confédéral de la Confédération française des travailleurs chrétiens (CFTC), Joseph Thouvenel raconte son engagement dans le monde syndical.

 

Quel est le sens de votre engagement au sein de la CFTC ? Ayant la chance d’être issu d’une famille catholique, d’avoir pu pratiquer le scoutisme, et ayant l’exemple d’un père qui a toujours mis en concordance ses idées et ses actes (il fut, par exemple, emprisonné à Fresnes par les nazis mais s’éleva avec vigueur contre les injustices de l’épuration. Médecin, il soignait gratuitement toute personne dans le besoin) : quoi de plus naturel que de s’engager dans l’organisation syndicale française qui se réfère explicitement à la doctrine sociale de l’Église !

Pourquoi est-ce important d’avoir des syndicats forts et représentatifs ? L’essentiel n’est pas d’avoir des syndicats forts et représentatifs (même si cela est souhaitable) mais des syndicats respectueux du bien commun et des personnes – salariés comme patrons – pour qui droits et devoirs peuvent s’équilibrer. Plutôt que des organisations au service d’une idéologie ou d’un parti.

Quelle est la spécificité du syndicalisme chrétien ? Son dernier « c », une boussole, pas un programme figé. Concrètement, affirmer que l’être humain a une double dimension matérielle et spirituelle et que l’organisation de la société, en général, et du monde du travail, en particulier, doit en tenir compte, me paraît essentiel. Comme l’affirmation du caractère sacré de tout être humain, la recherche du bien commun et de l’équilibre vie professionnelle/vie familiale. Le reste en découle… Propos recueillis par Gérard Biverny