
10 Fév La résiliation judiciaire du contrat de travail
Si vous reprochez à votre employeur des manquements graves empêchant la poursuite de votre contrat de travail, vous pouvez saisir le Conseil de prud’hommes au fin de résiliation judicaire du contrat.
Si les juges font droit à votre demande la rupture prononcée aux torts de votre employeur produira les effets d’un licenciement sans cause réelle et sérieuse voire un licenciement nul.
Si votre demande est rejetée le contrat de travail se poursuivra.
Ce mode de rupture, exclusivement réservé aux salariés (sauf les apprentis*) peut s’exercer, que le contrat soit à durée déterminée ou indéterminée, et même en cours de suspension (arrêt maladie par exemple).
Attention seul le jugement prononçant la résiliation judiciaire entraîne la rupture du contrat de travail et non pas la saisine du Conseil de prud’hommes au fond (action en référé non admise quelle que soit la gravité des manquements invoqués).
Les manquements susceptibles de légitimer une résiliation judiciaire :
- Une modification du contrat de travail (baisse des responsabilités hiérarchiques du salarié Cass. Soc 18 janvier 2018 n°16-21621)
- Non-paiement ou paiement tardif du salaire (compensation entre heures supplémentaires et utilisation « jugée abusive » par l’employeur du téléphone de l’entreprise, compensation constituant une sanction illégale cass. Soc 31 janvier 2018 n°16-14619). Abstention de paiement des salaires pendant plus de deux mois… non-paiement de primes constituant une part importante de la rémunération annuelle du salarié etc.
- Manquement à l’obligation de sécurité : absence de réaction de l’employeur face à une souffrance au travail (Cass. Soc 5 juillet 2017 n°15-23572)
- Atteinte à la dignité, harcèlement, non fourniture de travail
- Manquements spécifique envers les salariés protégés (défaut de réintégration, non-paiement des heures de délégation pendant cinq mois).
En cas de résiliation judiciaire les indemnités varient mais par principe que cette résiliation produise les effets d’un licenciement sans cause réelle et sérieuse ou un licenciement nul le salarié a droit à :
- L’indemnité compensatrice de préavis
- L’indemnité compensatrice de congés payés
- L’indemnité légale de licenciement (où conventionnelle si plus favorable).
En outre, dans le cas où les effets de la résiliation du contrat s’analysent en un licenciement sans cause réelle et sérieuse les salariés ont droit à des dommages et intérêts conformément à l’article L1235-3 du code du travail, ils ne peuvent cependant bénéficier de l’indemnité prévue en cas de non-respect de la procédure de licenciement.
Lorsque les effets de la rupture s’analysent en un licenciement nul les salariés ont droit à une indemnité au moins égale aux salaires des 6 derniers mois (articles L1235-3-1 et L1235-3-2).
Quant au droit à réintégration même si la loi a priori la permet, la Cour de Cassation l’a expressément exclue pour un salarié protégé (Cass. Soc 3 octobre 2018 n°16-19836) et pour les salariés non protégés la Cour opte pour une incompatibilité de principe entre la demande de résiliation judiciaire et une demande de réintégration (Cass. Soc 27 janvier 2021 n°19-21200).
A noter pour les salariés protégés en plus des indemnités de rupture et des dommages et intérêts liés à la nullité du licenciement ils ont droit à l’indemnité due en cas de violation du statut protecteur (égale à la rémunération qu’ils auraient dû percevoir jusqu’à l’expiration de la période de protection en cours au jour de la demande de résiliation judiciaire, incluant la période de protection supplémentaire qui suit l’expiration du mandat dans la limite de 30 mois de salaires).
*les apprentis doivent depuis la loi du 5 septembre 2018 saisir un médiateur de la chambre consulaire (code du travail art L6222-18) mais ne peuvent plus demander la résiliation judiciaire du contrat d’apprentissage.