
22 Mar Les absents ont toujours tort…
Il est de jurisprudence constante, que lorsque l’employeur invoque la faute grave du salarié, le licenciement doit intervenir dans un délai restreint.
A défaut la faute grave n’est pas justifiée.
En effet la faute grave étant celle qui rend impossible le maintien du salarié dans l’entreprise pendant la durée du préavis, la mise en œuvre de la procédure de licenciement doit intervenir dans un délai restreint après que l’employeur a eu connaissance des faits fautifs allégués et dès lors qu’aucune vérification n’est nécessaire.
Il a été jugé par la Cour de Cassation par exemple que devait être cassé, l’arrêt de la Cour d’appel qui a retenu une faute grave à l’encontre d’un salarié après avoir relevé que l’employeur, bien qu’il ait eu connaissance des faits fautifs le 26 mai, n’avait convoqué l’intéressé à l’entretien préalable à son licenciement que le 20 juillet suivant (Cass. Soc ; 16 juin 1998 n°96-42054).
Mise en œuvre de la procédure dans un délai restreint oui, lorsque le salarié est en poste mais quid du salarié dont le contrat de travail est suspendu et se trouve hors de l’entreprise ?
La Cour vient de répondre à cette question par une décision qui peut paraître surprenante de prime abord mais qui finalement reste dans la logique de sa jurisprudence et ne déforme en aucun point la définition de la faute grave.
Le sommaire de la décision est très clair : « Le fait pour l’employeur de laisser s’écouler un délai entre la révélation des faits et l’engagement de la procédure de licenciement ne peut avoir pour effet de retirer à la faute son caractère de gravité, dès lors que le salarié, dont le contrat de travail est suspendu, est absent de l’entreprise.
Il s’agissait d’une salariée avec beaucoup d’ancienneté puisqu’elle avait été embauchée en 1982 en qualité d’employée commerciale et promue cadre en 2008. A compter du 31 mai 2013 la salariée a été placée en arrêt de travail. Le 14 novembre 2014, elle fut convoquée à un entretien préalable où on lui reprochait des faits datant de 2011 et 2012.
Elle assigne l’entreprise, mais perd devant le Conseil de Prud’hommes et la Cour d’appel.
Elle saisit donc la Cour de Cassation motif pris que l’employeur avait pris un délai de quatre semaines entre la connaissance des faits (au plus tard le 17 octobre 2014) et sa convocation à un entretien préalable au licenciement (14 novembre suivant). Pour elle l’employeur ayant tardé à engager la procédure disciplinaire cela était de nature à exclure la faute grave, qui pour mémoire est la faute qui rend impossible le maintien du salarié dans l’entreprise.
Les juges n’accueillent pas ce raisonnement dans la mesure où ils constatent à l’instar de la Cour d’appel que le contrat de travail de la salariée était suspendu depuis le 31 mai 2013, elle était donc absente depuis lors. En conséquence l’écoulement d’un délai de 4 semaines ne peux avoir pour effet de retirer à la faute son caractère de gravité.
Cassation Sociale 9 mars 2022 n°20-20872