
08 Avr Succession d’employeurs et responsabilités
Dans certains cas déterminés par la loi, le transfert d’un contrat de travail d’une entreprise à une autre entraîne pour le nouvel employeur, la tenue des obligations qui incombaient à l’ancien employeur vis-à-vis des salariés transférés.
Ainsi par exemple, en cas de travail dissimulé, lorsque l’ancien employeur en est à l’origine, le salarié licencié par le nouvel employeur peut demander à ce dernier le paiement d’une indemnité pour travail dissimulé, à partir du moment où le contrat de travail a été transféré de plein droit, plus précisément en cas de modification de la situation juridique de l’employeur liée à une vente, fusion, transformation de l’entreprise.
Hormis ces cas, il peut bien sûr être convenu entre l’ancien employeur, le nouveau et le salarié une convention de transfert, mais celle-ci sauf stipulations expresses, n’emporte pas les mêmes conséquences que le transfert légal du contrat de travail.
C’est ce que vient de juger la Cour de Cassation, dans sa décision du 23 mars dernier (RG : 20-21.518).
Il s’agissait d’une salariée cadre passant d’une filiale au siège d’un grand groupe bancaire. S’estimant victime notamment de discrimination salariale, sexuelle, syndicale et de harcèlement discriminatoire avait saisi la juridiction prud’homale afin d’obtenir des rappels de salaires et des dommages et intérêts.
La Cour d’appel avait déclaré ses demandes irrecevables concernant la période antérieure au transfert du contrat de travail et décidé qu’elle n’était pas fondée à se prévaloir des manquements de la filiale à son égard.
La Cour de cassation suit les juges du fond en précisant : « La convention par laquelle un salarié quitte le poste qu’il occupait dans une entreprise pour entrer au service d’une autre entreprise, appartenant au même groupe, organisant ainsi la poursuite du contrat de travail, hors application de l’article L1224-1 du code du travail[1], n’emporte pas la transmission au nouvel employeur de l’ensemble des obligations qui incombaient à l’ancien employeur, sauf stipulations expresses en ce sens(…).
En effet, il aurait fallu que soit :
- La convention prévoit une application volontaire des dispositions de l’article L1224-1 du code du travail (permettant ainsi de mettre à la charge du nouvel employeur l’ensemble des obligations de l’ancien employeur à la date de la modification de la situation juridique).
- Ou qu’il existe une mention expresse de reprise par le nouvel employeur de l’ensemble des obligations qui pesaient sur le précédent employeur au moment du transfert.
En conséquence, La Cour de Cassation conclu au rejet de l’argumentation de la salariée et la déclare non recevable à former contre le nouvel employeur des demandes fondées sur des manquements imputables au premier employeur.
[1] Lorsque survient une modification dans la situation juridique de l’employeur, notamment par succession, vente, fusion, transformation du fonds, mise en société de l’entreprise, tous les contrats de travail en cours au jour de la modification subsistent entre le nouvel employeur et le personnel de l’entreprise.